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L’ILLUSTRE MAURIN

Pour t’en revenir à l’Espagne, dit Maurin, les gens de Camargue, chaque année, marquent leurs jeunes taureaux avec un fer rouge, afin de les pouvoir reconnaître et de savoir à qui ils appartiennent. On fait à cette occasion des jeux publics. On s’amuse avec les taureaux. Les gardians montrent leur adresse et leur force en se faisant poursuivre par les bêtes ; des fois, au moment d’être atteints, ils les évitent en sautant par-dessus, à la perche ; d’autres fois en posant le pied sur la tête du taureau, juste à l’instant où il baisse le front pour les embrocher avec ses cornes…

— Ils ont un fameux courage ! dit Pastouré.

— Peuh ! fit Maurin, j’ai essayé là-bas : j’ai réussi comme eux. Il faut être leste et ne pas perdre le sang-froid, voilà tout. Le taureau se retourne difficilement et un homme adroit l’évite sans trop de peine.

— Voilà un travail, interrompit Parlo-Soulet, qui me serait impossible à moi, gros comme je suis. Sais-tu que je pèse deux cent cinquante livres ?… je ferais péter toutes les perches, et, pour l’heure, le cheval que je monte doit regretter son gendarme !

— Pour t’en revenir aux Espagnols, reprit Maurin, on joue aussi en Espagne avec les taureaux, mais un jeu tout différent et qui n’est pas beau ! et que je n’aime guère !

— Je sais, dit Pastouré. On tue les taureaux devant tout le monde.

— Parfétemein ! On tourmente les bêtes ; on leur plante des flèches par tout le corps, comme on plante des épingles dans des pelotes. J’ai vu ça en Arles, où les Espagnols sont venus gagner beaucoup d’argent, pensant que leurs amusements de sauvages plairaient