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L’ILLUSTRE MAURIN

Et il fit retomber un portillon à coulisses verticales qui ferma le tunnel par où les lapins étaient arrivés dans ce trou.

— Osco manosco ! fit Pastouré le bras tendu, le poing fermé, le pouce en l’air.

Les lapereaux furent dépouillés, leur ventre ouvert, au couteau, d’une large fente longitudinale, et ils furent proprement couchés sur le gril, au-dessus d’une ardente braise de romarin et de bruyère. La renarde se régala des entrailles et de la tête.

— Tu vois que j’ai confiance en Maurin et en Pastouré, dit Saulnier à sa renarde. Ce sont des hommes prudents.

— As-tu du vin ? demanda Pastouré.

— Par malheur pour les vignerons, dit Saulnier, je peux m’en payer, et du meilleur, vu qu’il est à donation.

La porte fut rouverte, et, dehors, à la lueur d’une lampe à huile dont la brise faisait faiblement vaciller la flamme, sous les étoiles qui commençaient à jouer de la prunelle, ils burent et mangèrent allégrement.

— Ce qui me plaît en toi, Maurin, déclara Saulnier lorsqu’on en fut au dessert, au fromage et à la figue-fleur, c’est que toutes les histoires qu’on raconte de toi sont d’un homme libre. Et quand une sottise est faite devant toi, jamais tu ne la laisses passer.

— C’est plus fort que moi, répondit Maurin, je ne le fais pas exprès, car je n’aime pas les procès-verbaux, et à vouloir faire les choses comme on les voudrait voir faire, on est sûr de ne plaire ni aux gendarmes ni aux gardes, et pas toujours aux préfets. Ah ! si je voulais tout dire !

— Par exemple ? interrogea Saulnier.