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L’ILLUSTRE MAURIN

le juge. Le sage Bouddha nous ordonne de tuer en nous le désir.

— C’est chose facile aux riches qui ont tout à discrétion, repartit Maurin.

Et il fit circuler, dans trois ou quatre assiettes, ses deux melons coupés en tranches toutes reluisantes d’eau savoureuse.

Les convives se les offraient avec mille politesses :

«… Après vous… je vous en prie… non, après vous… quel parfum !… c’est délicieux… »

Le juge passa le melon à son voisin sans y toucher. Comme distrait, le procureur en saisit une tranche au passage et non la moindre.

Les narines du juge se dilataient de gourmandise et de regret.

— Pour en revenir à vos oiseaux-sorciers, dit Maurin, connaissez-vous le semble-figue ?

— Non ! non ! dirent-ils tous d’une seule voix, mouillée de jus de melon.

— Ce melon, dit Mme Labarterie, est bien le meilleur que j’aie mangé de ma vie. Aussi juteux qu’une pastèque.

— Et, insista M. Labarterie, plus savoureux qu’un cantalou.

Pastouré était perdu dans un rêve.

— Le semble-figue, dit Maurin est un oiseau comme le bec-figue mais bleu noir comme une mouïssonne, (sorte de figue). Le chasseur au poste, le voyant se poser dans un figuier, ne le perd pas de vue et met aussitôt son fusil en joue… et alors, dans le même moment, il cesse d’apercevoir l’oiseau. Dans le figuier, il ne voit plus que des figues. C’est que le semble-