Caboufigue, depuis qu’une terreur intense le travaillait, était sujet à de profonds troubles physiques de toute nature. Or, le malheureux éprouvait depuis un bon moment l’impérieux besoin de se dégonfler d’un rien, et il l’eût fait depuis longtemps s’il avait été sûr de pouvoir agir en silence et de se garder le secret, mais il avait craint au contraire un grand éclat et le scandale qui s’en serait suivi. La conversation qu’il venait de soutenir avait été trop sérieuse pour qu’il y mêlât brusquement, même en pleine forêt, une irrévérence. Il s’était donc contenu ; mais dans la seconde précise où Maurin, en montrant le blaireau, lui dit : « À toi ! » une idée vraiment sublime s’empara de ce cerveau vulgaire : d’un côté, il allait lâcher son coup de fusil ; et de l’autre, juste en même temps… Bref, il comptait que le fracas de la poudre couvrirait le bruit, sensiblement plus faible, qui se méditait en lui. Il visa donc le blaireau avec soin, prit bien son temps et pressa la détente ; mais le trouble qui ne l’abandonnait plus le rendait distrait, maladroit, et venait de lui faire commettre un oubli ; son arme était vide de cartouches ! Le chien s’abattit avec le bruit léger d’un raté, tandis qu’un crépitement formidable sortait de Caboufigue lui-même, épouvantant le blaireau qui, de terreur, se roulant en boule, se laissa dévaler jusqu’au fond du ravin, sans que personne songeât à le doubler, tant fut impérieux le rire qui secoua tous les chasseurs, à l’exception du très honteux Caboufigue.
— Bougre ! fit tout d’abord Maurin.
Puis, quand il eut bien ri :
— Tu es bien toujours le même, gros pourceau ! s’écria-t-il. Il n’est pas difficile de deviner que ça ne t’a