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L’ILLUSTRE MAURIN

pas échappé, car on aurait dit la bordée d’un cuirassé de premier rang !… Si ça t’avait échappé, il n’y en aurait eu qu’un, tandis que nous en avons eu tout un chapelet, avec des pater gros comme des cougourdes. C’est pourquoi je devine, clair comme le jour, que tu avais, ici, calculé ton affaire comme tu calcules toutes celles que tu fais. Tu t’es voulu servir du plus beau bruit qui soit au monde, celui de la poudre, pour cacher le plus honteux, auquel tu avais ton intérêt : ne dis pas non. Ô Caboufigue ! si ta candidature n’était pas morte d’avance, mon homme, c’est moi qui te le dis, tu l’aurais tuée de ce coup-là.

— Galége ! galége ! mais écoute-moi, murmura enfin Caboufigue, et fais ce que je te demande.

— Quand tu as le gibier devant, tu tires derrière toi, gros animal !… Je n’ai qu’à raconter cette histoire sans plus, conclut Maurin, et tu seras ridicule, pour des siècles, dans tout le pays du Var et dans mon royaume des Maures.

— Eh ! pardieu, fit Caboufigue impatienté, qui est-ce qui n’a pas commis une petite faute ? Toi-même, crois-tu que le monde t’approuverait, s’il savait de quelle manière et par quelle personne tu m’as fait obtenir ma croix ?

La monstruosité de cette parole vaguement comminatoire indigna Maurin. Comment ! ce Caboufigue qui avait profité de sa recommandation la déclarait scandaleuse, dangereuse même pour lui Maurin ! et il semblait prêt, si cela devait lui servir, à la dénoncer au mépris public ! L’indignation emporta le roi des Maures. On entendit de nouveau un bruit sec. Cette fois Caboufigue était giflé.