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L’ILLUSTRE MAURIN

tira de son carnier les fameux manchons et y plongea ses bras. Ses mains, au bout de ces gants fermés, pouvaient agir sous la basane souple… À sa droite, là-bas, sous bois, il aperçut un des gendarmes ; il se retourna… Sandri le gagnait de vitesse… Maurin ralentit sa marche… il arrivait au pied du rocher… Où était Grondard ?… « Oh ! quant à celui là, s’il se met en travers de ma fuite, tant pis pour lui !… »

— Halte ! Maurin ! cria Sandri. Nous vous tenons cette fois !

Les deux gendarmes se hâtaient… Quelques pas encore et ils s’emparaient de leur proie.

Maurin, son fusil derrière le dos, étendit ses bras devant son visage, les mains rapprochées en pointe à la manière d’un plongeur, et il entra dans la broussaille comme il fût entré sous une haute lame de la mer… Ses mains se disjoignirent ; il ouvrit les bras tout grands, écartant les branches épineuses et les repoussant en arrière, comme il eût chassé l’eau en nageant ; puis dans le vide, il avança sa tête, puis il ramena ses bras à hauteur de son visage pour les relever horizontalement, mains jointes, et de nouveau il les enfonça comme un coin dans l’épaisseur du mâquis… Et il avançait ainsi, de brasse en brasse, ramant le fourré, comme il disait, tirant sa coupe à travers bois, tout de suite disparu aux yeux des gendarmes stupéfaits.

Sandri eut un cri de rage :

— Il ne va pas vite ; entrons là dedans à sa suite. Nous l’aurons ! nous l’aurons !

Les deux « brasse-carré » essayèrent d’imiter les mouvements du braconnier et se jetèrent dans son sillage.