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L’ILLUSTRE MAURIN

contre pas le bon Dieu là-haut sur la terre puisqu’il est au fond de ce puits. Sian émé Dĭou ! nous sommes avec Dieu !

— Té ! il y en a une autre, en face de la tienne, — de galerie !

— Mettons-nous tous deux ensemble dans la même.

— Pardi ! nous nous réchaufferons l’un par l’autre.

Et allongés côte à côte, après avoir mangé les graines de pin et bu à leur soif, éreintés par trois nuits d’insomnie, les deux amis profondément s’endormirent.

Quand ils se réveillèrent, ils revirent là-haut, au-dessus de leur tête, les étoiles amies.

— Attends un peu ! dit Maurin, je vais aux nouvelles.

Il remonta à l’air libre, écouta, entendit au loin les appels des hommes qui étaient partout de garde au bord de l’incendie éteint. Il ne pouvait pas encore songer à la fuite, — mais il se dirigea vers la ferme voisine, qu’avait abandonnée, en toute hâte, depuis le commencement du sinistre, le berger qui l’habitait. Sous l’action de la chaleur, la porte du logis s’était déjetée et ouverte d’elle-même.

Maurin entra et poussa un cri de joie. Il avait aperçu sur la table deux gros pains. Il les prit et courut au puits. Il fit remonter un bout de la chaîne double (qui ne portait plus de seau) y attacha les pains et, penché au-dessus de la margelle, il cria à Pastouré :

— Voici de quoi souper.

Puis il rejoignit les pains que Pastouré avait décrochés.

— Avec ça et de l’eau-de-vie on se soutiendrait trois jours… Soupons.