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L’ILLUSTRE MAURIN

étant rouge, devrait respecter la couleur du vin, il y fourre de l’eau à plein arrosoir, par vengeance, parce que j’ai voté contre son candidat qui lui a promis de faire donner à Bourtoulaïgue et à Calas des courses de vaches espagnoles !… Voilà ce que je ne dis jamais. Voilà ce qui m’étouffe ! et je te le dis maintenant, parce que nous sommes bien tranquilles au fond d’un puits, comme la Vérité, et gris d’aïguarden, mon homme, comme la Vérité !…

« Ah ! non ! je suis d’une autre époque, moi, ami Maurin ! D’une époque où les femmes n’étaient ni chefs de gare, ni turcos, ni sénateurs, ni avocats, ni députés, ni libres enfin ! Elles avaient la liberté d’être grosses dans la saison et de faire téter en temps voulu et, après avoir désemmailloté, de remmailloter ! Ça ne leur laissait pas de temps pour courir les routes sur deux roues ! Et alors on les respectait à cause de leurs petits, et maintenant on ne les respecte plus parce qu’elles sont à Antibes quand leurs mamans les croient aux Martigues !… Du temps de reste, une femme n’en a pas. Elle emploie une année à mettre au monde un enfant qui ne m’a coûté à moi qu’une ou deux minutes. Et voilà ce que, du fond de ce puits, je crie à mon siècle, moi, Parlo-Soulet ! car je suis d’un siècle où les femmes restaient à leur place et obéissaient aux hommes, comme chez le grand Turc. Et de leur obéissance d’autrefois, je vais te donner la preuve en te disant, Maurin, comment et pourquoi je suis né.

« Mon père, naturellement, après avoir eu notre aîné, Victorin, mon pauvre mort, pechère ! souhaitait d’avoir un second garçon. Il le dit à ma mère qui, naturellement, n’en tint aucun compte et qui, cette seconde