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L’ILLUSTRE MAURIN

fois, au lieu de lui donner, un enfant — un enfant, m’entends-tu ? — ne lui donna qu’une fille !… ». En conséquence, mon père fut très ennuyé ; il ne parla pas de plusieurs jours à ma mère, afin de lui faire comprendre qu’il n’était pas content de ce qu’elle avait fait là. Elle comprit, collègue ! et elle résolut de mieux faire à la prochaine fois. Et, l’année suivante, mon père, qui attendait dans la chambre voisine de celle de l’accouchée, demanda : « Eh bien ? — Eh bien, qu’on lui répondit, ce n’est encore pas un enfant, c’est encore une fille ! » À la quatrième fois, le même malheur arriva ; ça faisait trois filles. Le malheureux Pastouré, mon père, en fut malade, parce que, de désespoir, il se mit à boire et en ce temps-là on ne le voyait presque jamais bien droit, — pauvre homme ! — par la faute de sa femme. À cette quatrième fois, quand mon père eut appris que c’était encore une fille au lieu d’un enfant, il jura Dieu que ça n’arriverait plus et voici comment il fit pour cela. Quand sa femme fut de relevaille, il prit une blette (baguette fine), une tige de noisetier, et, sans lui faire trop de mal, il lui caressa l’échine en répétant : « C’est un garçon que je veux ! c’est un garçon que tu me dois ! c’est un garçon qu’il nous faut !… Si à la cinquième fois, ajouta-t-il, tu as le malheur de me faire encore une fille, je te planterai là avec ton tiers de douzaine de filles, et tu trouveras un jour les imbéciles qu’il leur faudra quand elles seront en âge de tromper un homme ! »

« Eh bien, mon brave Maurin, ma mère ne dormit plus, — mais son entêtement céda ! et à la cinquième fois, je naquis par la ferme volonté de mon père, moi, Marius-César-Antoine-Auguste Pastouré dit Parlo-Soulet !… Et je te réponds qu’à ma naissance les pétards pétèrent…