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L’ILLUSTRE MAURIN

tu m’as attiré vers toi avec tes caresses de chevrette, je t’ai répondu comme un homme répond à une femme qui l’appelle.

— Moi, je t’ai appelé ?

— Tu m’as appelé

— Oh !

Elle le regarda effrontément dans les yeux, en répliquant :

— Et que sais-tu de moi, qui t’ait fait me répondre comme un homme à une femme ? Je ne suis qu’une pauvre fille honnête, pechère ! tout le monde le dira.

Il se rasséréna, persuadé que lorsqu’il aurait satisfait à sa question, la petite se tiendrait pour vaincue :

— Eh ! dit-il, crois-tu que je ne t’ai pas vue l’autre soir, au fond de la baïsse des Darboussettes, avec le petit berger Chichourlet ?

Elle sourit à l’image du berger :

— Il me cueillait des mûres, dit-elle.

Maurin sentit la colère lui monter à la tête. Il avait vu ce qu’il avait vu.

Elle reprit :

— Veux-tu me prendre en mariage, oui ou non ?

— Que tu es bête !… Non ! dit-il simplement, non, de sûr !

— Eh bien ! siffla-t-elle, ce sera comme je te l’annonce : je te ferai passer pour un voleur de filles honnêtes… Et c’est la vérité !

Il la regarda. Il avait entendu conter aux veillées des histoires de sorciers. Dans un de ces contes, une vieille fée, quand elle est sous sa forme véritable, ressemble à une espèce de dragon perché sur deux pieds de tardarasse (buse), avec un bec crochu et des yeux ronds,