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L’ILLUSTRE MAURIN

— Non, dit-il, ni manger ni boire. Où en sont ici les affaires ?

— Nous avons eu des mots avec Sandri, à cause de toi. Il n’est plus revenu, mais il nous a fait dire qu’au premier jour il reviendrait sans rancune. Je me suis trop moqué de lui qui t’avait laissé échapper, et il s’est un peu fâché. Vois-tu, Maurin, rien que de te savoir prisonnier, j’en serais tombée malade, j’en serais devenue folle. Tu es une bête libre, mon beau Maurin ! tu en mourrais toi-même, d’être dans une prison !

Il l’embrassa longtemps, doucement, sur tout son joli visage. Elle répétait :

— Vaut tout de même mieux que mon père ne te voie pas. Va-t’en, maintenant.

— Si tu préfères… mais alors, viens me voir un peu tout à l’heure, à la cantine du Don.

— Je veux bien, dit-elle, va. Nous y serons plus libres.

Il y alla. Elle le rejoignit et, là, tout heureuse de le voir, sans plus rien demander, elle se tint un moment debout dans ses bras, immobile et muette. Non, vraiment, elle ne songeait plus à lui demander autre chose, ni mariage ni fidélité ! La raison était partie d’elle. Elle l’aimait. Et, heureuse, elle eût quitté, à cette heure, la maison paternelle si Maurin lui avait dit : « Viens. » Elle aurait suivi son loup sauvage partout où il aurait voulu, quand elle aurait dû en mourir.

Ils causèrent longtemps…

— Tout un soir je t’ai cru mort, mon brave Maurin !… J’aurais tué Grondard, si Grondard t’avait tué !

— Et tu aurais eu bien tort, déclara Maurin.

— Tort ! s’écria-t-elle, tu ne comprends donc pas la