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L’ILLUSTRE MAURIN

orgueilleuse d’elle-même, elle devrait être fière de toutes les races qui la font ce qu’elle est… Car les Parisiens, nous savons ce que c’est : un tas de provinciaux qui renient leur province pour faire des embarras.

— Bien envoyé ! dit Maurin.

— Au lieu de cela, vous nous blaguez, vous jouez aux tyrans dédaigneux, vous oubliez que c’est nous qui vous expédions nos valeurs intellectuelles que vous n’avez qu’à faire reluire.

— Bravo ! fit Pastouré.

— Vous êtes aussi gobeurs, aussi flâneurs, aussi badauds que nous, — et peut-être davantage. Alors pourquoi prétendre que tout ce que vous faites est bien, — et tout ce que nous faisons, ridicule ? Depuis les chemins de fer, nous ne sommes plus assez loin de Paris pour être traités en Canaques !

— Vive Cigalous ! dit Maurin.

— Laissez-le parler, Maurin, dit M. Rinal, il parle comme un ange.

— Vous criez : « Ohé, Marius ! » et notre accent vous paraît rigolo, — mais l’accent traînard du voyou de Paris ne vous choque pas ! Seulement il sent le ruisseau, et le nôtre sent l’eau marine, l’algue, les oursins et les praires.

— Aganto ! dit Maurin.

— M’est avis, poursuivit Cigalous très excité, m’est avis que la tyrannie et l’orgueil d’une capitale peuvent être aussi insupportables et aussi nuisibles au pays que la tyrannie d’un homme. La Révolution française n’a pas été faite au profit de Paris tout seul ! Et par qui commencée ? par M. de Mirabeau, qu’èro d’Azaï, qui était d’Aix, — et ce n’est pas pour rien que la Marseillaise ne s’appelle pas la Parisienne !