L’enfant regardait le monsieur. Le vieux médecin lui frappa la joue de ses deux doigts tendus ; puis, de ses bonnes mains, lui palpa les épaules, les bras, la poitrine…
— C’est bien établi, dit-il, le reste viendra par surcroît… Va jouer au jardin, garçon. Nous allons causer, ton père et moi ; mais ne touche pas à mes fleurs. Je t’en donnerai, quand tu t’en iras.
L’enfant sortit, content.
— Eh bien ? interrogea M. Rinal.
— Monsieur, dit Maurin, des gens d’ici me le soigneront et je le laisserai à Bormes si vous voulez bien lui donner « un peu de leçons »…
— Des leçons de quoi ? c’est là-dessus qu’il faut s’entendre. Que voulez-vous faire de lui ?
— Je ne sais pas, dit Maurin, je veux qu’il ne soit pas comme moi, qui ne sais pas lire ou presque pas, et à peine signer. Ça m’embarrasse souvent. Je suis un sauvage. Ce n’est plus le temps d’être comme moi.
— J’entends bien ; mais il sait lire, le petit ?
— Écrire et compter, oui, monsieur.
— Est-ce qu’il faut lui apprendre l’anglais ? ou bien l’allemand ?
— Si vous croyez que c’est bon.
— Alors vous n’avez pas d’idée sur ce que vous voulez qu’il fasse ?
Maurin commençait à tortiller fiévreusement son chapeau entre ses doigts. Heureusement la vieille loque de feutre n’avait plus rien à perdre. Il la triturait, embarrassé, cherchant des idées, des mots. Plein de l’envie de plaire au monsieur qui lui plaisait beaucoup, plein d’un désir vague, infini, de quelque chose qu’il ne