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MAURIN DES MAURES

à votre fille Tonia, pour laquelle mon cœur est prêt à tous les loyaux services d’un bon Corse et d’un bon soldat ?

Orsini vida lentement sa pipe en la frappant sur son ongle.

— Moi, ça me va, dit-il. Il faut appeler Tonia. Ça la regarde un peu.

— Un père a toute autorité sur une fille jeune, répliqua Sandri avec énergie. Ne craignez-vous pas de la résistance chez votre fille, si vous la consultez ?

— Et pourquoi de la résistance ?

— Elle pourrait avoir choisi un autre futur ; les filles sont inconsistantes.

Il voulait dire inconstantes. Mais le lapsus le servait.

— Et sur qui aurait-elle des intentions ? demanda Orsini.

Alessandri hésita. Brave homme au fond, il se demandait s’il n’accusait pas à la légère la jeune fille. Mais il se dit que si elle avait réellement un penchant pour ce Maurin qu’il méprisait, c’était la sauver que d’en parler à son père.

— Sur qui, pensez-vous ? répéta le forestier.

— Mais… sur le braconnier Maurin !…

Orsini se leva tout pâle.

— Per Bacco ! si je savais ça ! Un homme de rien ! un coureur de filles !… un braconnier ! Savez-vous quelque chose là-dessus, Sandri ?

Il se rassit et, froidement :

— C’est que, voyez-vous, je la tuerais !

Il allait vite aux conclusions farouches, le Corse.

Sandri se replia en bon ordre.

— Je ne sais rien ; c’est une crainte.

— Sans un motif ?