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MAURIN DES MAURES

CHAPITRE XXI


D’où il appert qu’un pardessus d’été est le vêtement ridicule par excellence, et où l’on verra comment le don Juan des bois, pour conquérir une femme du Var, s’assura la complicité d’une aigle des Alpes.


Maurin, le carnier au dos et suivi d’Hercule, son griffon, passait non loin de la ferme des Agasses, dans un pli de vallée entre la Molle et les Campaux.

Presque au fond du vallonnement, au bord d’une pente au midi, la ferme des Agasses et le hangar attenant riaient au soleil d’hiver.

La fermière donnait du grain à ses poules sur le pas de sa porte et de temps à autre regardait son mari qui, à peu de distance de la maison, marchait derrière l’araire, insultant son cheval tantôt trop lent, tantôt trop rapide à son gré.

On entendait distinctement les injures hurlées par le laboureur. Pressées et continues, elles formaient une sorte de monologue digne d’un Pastouré — et Maurin, arrêté, écoutait joyeusement :

— Ô mendiant ! Ô forçat ! tu le gagnes, dis, le foin que tu manges ?… On t’en donnera, brigand, de l’avoine, pour travailler comme ça !… Hue, bourrique !… un bœuf va plus vite, cent fois ! cent fois plus vite, de sûr !… Regardez-le, qu’à présent il prend le mors aux dents ! Oh ! oh ! arrête, chameau, que tu voles avec des