Les quatre gendarmes considéraient le lit bas où très visiblement se dessinait sous les draps une forme humaine.
Un des serviteurs de la loi eut une réflexion bizarre :
— On lui pourrait compter les doigts du pied, à ce grand cadavre !
— Nous sommes dans l’exercice de nos fonctions, fit avec noblesse Alessandri, et c’est pour dire que nous devons nous rendre compte de la physionomie de la personne.
— Ma foi, vous feriez bien, vous, de ne pas insister, gendarme Sandri ; et croyez-moi, c’est dans votre intérêt que je parle, répliqua Maurin d’un air de parfaite bonhomie.
Alors Margaride, n’y tenant plus, repoussa brusquement le drap qui lui couvrait le visage :
— Est-ce vrai, Sandri, dit-elle, que tu es fiancé à Tonia Orsini ? En ce cas, mon garçon, j’avais bien le droit de prendre un nouvel amoureux et c’est Maurin, parce qu’il est plus beau garçon que toi ! Té !
Alessandri devint pâle.
— Qu’est-ce que c’est ? murmura-t-il, perdant la tête.
Il n’osait regarder ses compagnons, qui ne purent s’empêcher de rire.
— Nous sommes refaits ! grogna le gendarme Lecorps. Tu n’as pas de chance, Sandri, avec ce lièvre-là !
— Eh ! fit Maurin, en bras de chemise, très à l’aise et bourrant sa pipe, eh ! gendarme, il n’y a pas grand mal, puisque la belle fille en rit la première… Mais maintenant, messiés, comme vous n’avez plus rien à faire ici, je vous prierai, sans vous commander, de fermer la porte en sortant…