CHAPITRE XXVI
Maurin se glissa contre le mur, derrière la longue et lourde table, décidé à retarder au moins le moment désagréable où la main du gendarme s’abattrait sur son épaule.
— Comme ça, fit-il, dis-moi un peu, tu les as les ordres qu’il faut pour m’arrêter ?
— Mandat d’amener, dit le gendarme avec importance.
— Voyons voir, fit Maurin gouailleur.
Le gendarme menaçant prononça :
— Tu vas voir !
Alors Maurin prit sur la table le petit verre d’eau-de-vie qu’il n’avait pas touché encore, et l’élevant avec un geste semi-circulaire :
— À votre santé, la compagnie ! au plus beau des gendarmes ; au plus brave des gardes-forêts ; à la plus jolie des Corsoises !
Et il but.
Orsini trouvait fâcheux pour l’administration qu’une pareille scène eût lieu chez lui, mais il savait ce que c’est qu’une consigne : Alessandri devait arrêter Maurin ; il l’arrêterait donc. Lui, il n’avait rien à dire et, en effet, il se taisait, avec un air un peu farouche.