— En service ! cria Maurin, celle-là est forte. À cheval sur une chaise, le gendarme n’est pas en service !
Tout le monde s’était levé, et tandis que le gendarme apprêtait son papier et réquisitionnait un encrier, Maurin sortit, protégé par des groupes complices. Il avait cligné de l’œil : on avait compris que le galégeaïré allait jouer aux représentants de la loi un tour de sa façon.
Les gendarmes ne songeaient d’ailleurs pas à l’empêcher de sortir. Il ne s’agissait pas d’une arrestation. Pour un simple procès-verbal, il leur suffisait d’être sûrs de l’identité de leur homme.
Or, en même temps que Maurin, l’un des assistants, que le fameux braconnier n’avait pas eu l’air de connaître et qui n’avait pas prononcé une parole, avait disparu silencieusement.
C’était un certain Pastouré, dit Parlo-Soulet, c’est-à-dire Parle-Seul, homme de puissante stature, colosse naïf, admirateur de Maurin et son compagnon favori ; mais Pastouré jugeait utile de ne pas afficher hors de saison son amitié pour le Roi des Maures, qu’en toute occasion il servait de son mieux.
On ne voyait pas souvent Maurin et Pastouré causer ensemble. Même au fond des solitudes, Pastouré (c’était, comme il le disait, sa nature) adressait rarement la parole à ses compagnons de chasse.
En revanche, lorsqu’il était ou se croyait complètement seul, il bavardait à voix haute avec de grands gestes. Cet homme était l’incarnation du monologue. Quant à ses gestes, ils étaient célèbres. On le voyait parfois, en silhouette sombre sur le bleu du plein ciel, au sommet d’une colline, agiter ses longs bras comme un télégraphe. C’est qu’alors il se désignait à lui-même