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MAURIN DES MAURES

— Non, dit Maurin, si le vent s’y prête, je partirai tout à l’heure ; j’ai plus d’une affaire.

— Je connais la phrase, canaille ! fit gaiement le Crésus de l’île d’or. Ça signifie qu’une petite femme t’attend quelque part, qué ? Tu es donc toujours le même ? un don Juan, le don Juan des Maures, comme s’exprime le percepteur de Collobrières !

— Je mourrai le fusil au poing, déclara Maurin.

— Et la main sur le cœur, conclut Caboufigue. Té ! admire un peu mes cygnes sur mon bassin… J’ai de l’eau à volonté, maintenant, avec des citernes qui me coûtent les yeux de la tête.

— C’est cher, dit Maurin, j’aime mieux avoir mes yeux que posséder tes citernes.

— Et regarde-moi ce port que j’ai creusé à la dynamite.

— Je pensais bien, répliqua Maurin agacé, que tu ne l’as pas creusé avec les dents.

— Et ces faisans sauvages, vé ! là-bas, à qui je fais distribuer des œufs de fourmis trois fois par semaine, au temps des amours !

— Peuh ! dit Maurin, des faisans ! des faisans, ça n’est jamais que des volailles qui font des embarras !

— Quel animal ! dit Caboufigue en frappant sur le ventre de Maurin, rien ne l’étonne !

— Ce qui m’étonnerait, dit Maurin de plus en plus agacé, ce serait de voir un riche ne pas vanter bêtement sa fortune devant un pauvre ! Mais ça, je ne l’ai jamais vu. Sur cette question-là, le plus malin d’entre vous devient tout à coup aussi sot qu’un autre.

— T’aurais-je fâché ? dit Caboufigue avec un accent d’inquiétude sincère.