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MAURIN DES MAURES

Là-dessus Maurin avait dit :

— Bonne nuit, Parlo-Soulet, tirons chacun de notre côté à travers bois, bonsoir !

Ils s’étaient séparés. La nuit était profonde, ils entrèrent dans les broussailles et gravirent les premières pentes de la colline. La route, au-dessous d’eux, disparaissait, pâle un peu dans le noir.

À peine s’étaient-ils quittés que Parlo-Soulet, dans le sentier rocailleux et sonore, s’assit sur une roche. Inclinant la tête, il prêta l’oreille :

— Tiens ! fit-il à voix haute. Le bougre déjà ne s’entend plus. Avec ses espadrilles, il s’est fait le pas d’un renard !

On n’entendait en effet que le balancement des branches vibrantes, agitant leurs myriades d’aiguilles traversées par le vent ; puis le galop de deux chevaux passa en ouragan sur la route, à vingt pas de Pastouré ; c’étaient les deux gendarmes qui, trompés par l’habile manœuvre des braconniers, filaient vers Cogolin où ils se croyaient sûrs de les retrouver !… ils passèrent, et la route tremblait sous leur galop dont l’écho des collines répétait le bruit de tonnerre de plus en plus éloigné… puis ce fut, de nouveau, le grand silence.

Alors Parlo-Soulet parla.

Il parla d’une voix nette, claire, comme il eût fait pour être entendu d’un camarade un peu sourd :

— Noum dé pas Dioû !… fit-il, en voilà une, d’histoire ! Elle est drôle, celle-là ! Elle vaut les autres histoires du même Maurin ! Je l’aime bien, cet animal, mais ce n’est pas pour dire, il me fera, quelque jour, finir en galères !

Cette expression de noum dé pas Dioû est le juron des