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MAURIN DES MAURES

l’y traîne les mains liées. Et quand je songe qu’ils vont passer par-ici tout-à-l’heure… avec lui !

Elle regarda à travers les vitres et poussa un cri :

— Les voilà !

Elle se recula vivement, pour ne pas voir Maurin qu’elle supposait avec les gendarmes dont elle venait d’entrevoir l’uniforme à travers les pins…

Sandri pensait bien reprendre ses chevaux où il les avait laissés, à la cantine du Don, sans entrer chez Orsini, pour n’avoir pas à confesser la ridicule aventure qui venait de lui arriver, mais il comptait sans son futur beau-père qui lui cria :

— Sandri !… Ce n’est donc pas vrai, ce qu’on raconte, ou bien avez-vous confié à ceux de Collobrières l’honneur de conduire l’homme où il faut ?… Arrive et entre un peu, qu’on boive un coup en parlant de cette affaire !

Force fut à Sandri d’accepter l’invitation.

— Bonjour, Tonia ! fit-il… vous avez les yeux bien rouges ?

— C’est que je viens, dit-elle, de hacher des oignons.

— Et ton prisonnier, Sandri ? interrogea Orsini.

Sandri se tut, hésitant.

— Le bougre nous a échappé, avoua l’autre gendarme nettement.

Tonia regarda Sandri. Il était pâle à faire peine et se mordait la moustache. Elle eut beaucoup de mal pour s’empêcher de rire. Elle ne dit rien et apporta sur la table des verres pour tout le monde, les bouteilles qu’il fallait, puis se mit à soulever et à reposer cent fois les couvercles de ses marmites et les pots à épices alignés par rang de taille sur la haute cheminée.