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MAURIN DES MAURES

— Ah ! çà, vaï, sept, huit francs, dans cette saison ! pour quinze tu ne l’aurais pas !

— C’est à Paris qu’ils seraient contenta d’avoir la pareille, au mois de juin !…

— De lièvre, moi, dit l’aîné, je n’en ai pas mangé deux fois dans ma vie.

— C’est bon ? dit le second.

— Meilleur que du poulet, bien sûr !

— Quand est-ce qu’on la mangera ? demanda le plus petit des trois garçons.

À ce moment, misé Pitalugue s’écria :

— Bou Dioù ! Elle a du lait, voyez, pechère ! C’est une mère… c’est facile à comprendre que ses petits l’attendent quelque part…

Elle pressait les mamelles de la pauvre bête épouvantée et haletante. Les gouttes de lait venaient au bout des tétines.

— C’est embêtant, dit l’homme.

Et tous, un long moment, gardèrent le silence, bien ennuyés.

— Pourquoi, embêtant ? dit l’aîné. Est-ce qu’elle sera mauvaise ?

— C’est embêtant qu’elle ait des petits, dit la femme. Ça fait peine, tout de même, de penser qu’ils vont mourir dans un trou !

La lièvre, bien liée par les pattes, fut déposée à terre. Et tous s’assirent autour d’elle, tenant conseil.

Il y avait un bon moment, poursuivit Maurin, que, passant par là, je m’étais approché d’eux.

« Ils m’expliquèrent toute l’affaire. »

— J’étais avec Maurin, confirma alors Pastouré, qui suivait attentivement tous les détails du récit en remuant