Voilà le don Juan des bois. Convenez qu’il est sympathique.
— Il est surprenant, dit le préfet.
— Surtout si vous songez que, chez les paysans, l’idée d’intérêt passe pour primer toutes les autres, — l’acte de Maurin devient superbe.
— Où est cette fille, à présent ?
— La petite Maurin est servante chez des bourgeois de Grimaud. Elle y a appris la couture et les bonnes manières ; elle est en train de devenir une sorte de demoiselle de compagnie. Or l’état de domestique semble déshonorant à nos Méridionaux en général ; mais Maurin proteste, disant que tout le monde est au service de tout le monde. Il ajoute : « Mon chien est mon domestique et mon ami, et je suis le domestique et l’ami de mon chien. Et ça me fait honneur ! »
— Et vous dites qu’il a, de plus, un tout jeune fils, votre Maurin des Maures ?
— Oui, le petit Bernard, qui vit chez la mère de Maurin ou qui, du moins, s’y trouvait encore il y a quinze jours. Il a onze ans. Il est né d’une fille de cantonnier. Oh ! une histoire toute simple… Vous voyez que notre don Juan n’est pas de l’école de Jean-Jacques.
— Trois enfants, c’est peu, dit le préfet. La France se dépeuple. Maurin n’aura pas la prime.
— Trois enfants avérés ! dit M. Cabissol. D’ailleurs la vie est chère et dure. Les bourgeois les plus aisés sont moins prolifiques et, par conséquent, moins courageux que Maurin.
— C’est vrai, dit le préfet. Mais… vous déjeunez avec moi, monsieur Cabissol ?
— À condition que je serai de votre battue avec Maurin,