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LES PIEDS FOURCHUS

Ce serait les mener à la boucherie : j’en ai vu qui étaient lancés à vingt pieds en l’air et qui, en retombant, cassaient la croûte de la neige et y disparaissaient pour toujours.

— La mort… ! vingt pieds en l’air… ! Mais à quoi pensez-vous, père, à quoi… ?

— Luther !

— Sir.

— Vous faites-vous une idée de ce que signifie ce pied fourchu ? à genoux, à genoux, garçon ! étudiez-moi çà !

— Oui, Père.

— Bien ! et… qu’en pensez-vous ?

— Ouf ! certainement, c’est le pied du vieux Gentilhomme (du diable), je le reconnais bien.

— Vous n’êtes pas sot, Luther !

Le jeune homme commença à perdre contenance et se mit à regarder autour de lui : l’attitude de son père l’étonnait ; il ne l’avait jamais vu de si belle humeur. Le vieillard semblait rajeuni ; sa parole et son geste avaient une ardeur juvénile, railleuse, un entrain incompréhensible.

— Luther !

— Quoi, Père ?