Page:Aimard - Curumilla, 1860.djvu/117

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d’eux, ils se laissèrent tomber sur le sol, résolus à attendre la mort, qui sans doute ne tarderait pas à venir terminer leurs misères.

Ils demeurèrent ainsi côte à côte, la tête penchée, l’œil atone, dans cet état d’anéantissement complet qui s’empare des hommes les plus forts après les grandes catastrophes et suspend chez eux jusqu’au sentiment intime du moi et interrompt la pensée.

Combien de temps restèrent-ils ainsi ? Ils n’auraient su le dire. Ils ne vivaient plus, ils ne sentaient plus : ils végétaient. Ils furent tout à coup réveillés subitement de cette torpeur extraordinaire par l’apparition subite d’une troupe d’Indiens apaches qui caracolaient autour d’eux en poussant des hurlements féroces et en brandissant leurs longues lances d’un air de défi et de menace.

Les Indiens s’emparèrent d’eux sans qu’ils opposassent la moindre résistance, et les emmenèrent à un de leurs athepelt ou village, où ils les contraignirent à l’esclavage le plus honteux et le plus humiliant.

Mais l’énergie un instant abattue des deux aventuriers n’avait pas tardé à reprendre le dessus dans leur cœur. Alors, avec une patience, une habileté et une dissimulation extrêmes, ils préparèrent leurs moyens de fuite.

Nous n’entrerons dans aucun détail sur la façon dont ils échappèrent enfin à la surveillance de leurs gardiens, et parvinrent après des traverses sans nombre, à atteindre la colonie, rendus de fatigue et demi-morts de faim, pour arriver de suite et sans transition au point important de leur narration.

Ces hommes affirmèrent aux colons que le village