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L’ÉCLAIREUR.

Après avoir traversé une gorge assez profonde, dont les flancs rapides étaient couverts de fourrés impénétrables, le jeune homme arriva à une espèce de carrefour étroit où aboutissaient plusieurs sentiers de bêtes fauves, et au centre duquel un Indien, revêtu de son costume de guerre, fumait gravement accroupi devant un feu de fiente de bison, pendant que son cheval, entravé à quelque distance, broutait du bout des lèvres les jeunes pousses des arbres. Dès qu’il aperçut l’Indien, don Miguel pressa l’allure de son cheval afin de le joindre plus promptement.

— Bonsoir, chef, dit-il en sautant légèrement à terre et en serrant amicalement la main que lui tendait le guerrier.

— Ooah ! fit le chef, je n’attendais plus mon frère pâle.

— Pourquoi donc, puisque je vous avais promis de venir.

— Peut-être aurait-il mieux valu que le visage pâle demeurât dans son camp ; Addick est un guerrier, il a découvert une piste.’

— Bon ! les pistes ne manquent pas dans la prairie.

— Och ! celle-ci est large et foulée sans précaution : c’est une trace des visages pâles.

— Bah ! que m’importe, fit insoucieusement le jeune homme ; croyez-vous donc que ma troupe est la seule qui parcoure les prairies en ce moment ?

Le Peau-Rouge secoua la tête.

— Un guerrier indien ne se trompe pas sur le sentier de la guerre. Cette piste est celle d’un ennemi de mon frère.

— Qui vous le fait supposer ?

L’Indien parut ne pas vouloir s’expliquer plus clairement ; il baissa la tête, et au bout d’un instant il répondit :