les Espagnols d’un côté et les Américains du Nord de l’autre, a senti le besoin de doubler ses forces pour triompher des deux formidables ennemis qui la harcèlent sans relâche, et peu à peu ses enfants ont modifié dans leurs mœurs ce qui leur était nuisible, pour s’approprier celles de leurs oppresseurs et les combattre par leurs propres armes ; ils ont poussé si loin cette tactique, qui, du reste, les a jusqu’à ce jour sauvés non-seulement du joug, mais encore d’une totale extermination, qu’ils sont passés maîtres en fourberies et en ruses ; leurs idées se sont agrandies, leur intelligence s’est développée, et ils sont parvenus à surpasser leur ennemis en astuce et en diplomatie, si nous pouvons nous servir de cette expression. Et cela est si vrai que, depuis trois cents ans, ceux-ci non-seulement n’ont pas réussi à les dompter, mais même à se soustraire à leurs invasions périodiques, ces invasions que les Comanches nomment superbement la lune du Mexique, et pendant le cours desquelles ils ruinent impunément tout ce qui se rencontre sur leur passage.
Peut-on véritablement considérer comme des sauvages ces hommes qui, refoulés jadis par la terreur des armes à feu et la vue des chevaux, ces animaux dont ils ignoraient l’existence, contraints de se cacher au sein de montagnes inaccessibles, ont cependant défendu leur terrain pied à pied, et, dans certaines régions, sont arrivés à reconquérir une portion de leur ancien territoire ?
Mieux que personne, nous savons qu’il existe des sauvages en Amérique, sauvages dans toute l’acception du mot ; mais ceux-là on en a eu bon marché, chaque jour ils disparaissent du sol, car ils n’ont ni l’intelligence nécessaire pour comprendre ni l’énergie pour se défendre. Ce sont ces sauvages dont nous parlons qui, avant d’être soumis aux Espagnols ou aux Anglo-Américains, l’étaient aux Mexicains, aux Péruviens et aux Araucans du Chili, et cela