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L’ÉCLAIREUR.

Sur un signe de lui, les hommes saisirent tous des pagaies et imprimèrent un tel élan à leur pirogue, qu’elle sembla voler sur l’eau.

La situation se faisait critique pour les blancs.

Bon-Affût, debout, appuyé sur son rifle, calculait froidement les chances pour et contre de cette rencontre inévitable. Ce n’étaient pas les embarcations qui lui donnaient la chasse qu’il redoutait, elles étaient à une trop grande distance en arrière pour espérer l’atteindre ; toute son attention se portait sur celles qui venaient à l’avant et entre lesquelles il fallait absolument passer. Chaque coup de pagaie diminuait la distance qui séparait les blancs des Peaux-Rouges.

Les pirogues ennemies, autant qu’on pouvait en juger de loin, semblaient surchargées de monde et n’avancer qu’avec une certaine difficulté. Bon-Affût avait jugé la position d’un coup d’œil infaillible ; il prit une de ces résolutions hardies auxquelles il devait la grande réputation dont il jouissait, résolution qui, seule, dans ce moment critique, pouvait le sauver, lui et les siens.



XXXVIII.

Peaux-Blanches et Peaux-Rouges.

Bon-Affût avait, ainsi que nous l’avons dît, pris une résolution suprême. Au lieu de chercher à s’échapper en passant entre les deux pirogues, ce qui était risquer de se faire couler, il appuya légèrement sur la gauche et mit le cap directement sur la pirogue la plus près de la sienne.

Les Indiens trompés par cette manœuvre dont ils ne comprirent pas d’abord la portée, l’accueillirent par des cris