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L’ÉCLAIREUR.

depuis qu’il a visité ces parages en compagnie du chasseur pâle auquel il donne le nom de Bon-Affût.

L’aventurier se redressa brusquement, une vive émotion se laissa voir sur son visage.

— Que voulez-vous dire, au nom du ciel ! Peau-Rouge ? s’écria-t-il avec émotion.

— Je veux dire que Quiepaa-Tani est là, répondit l’indien en étendant le bras dans la direction du sud-ouest, que nous en sommes éloignés à peine d’une demi-journée de marche.

— Il serait possible ?

— Un chef ne ment jamais.

— Oh ! s’écria le jeune homme avec énergie en se levant subitement, merci de cette bonne nouvelle, chef.

— Qu’allez vous faire ? lui demanda Balle-Franche.

— Comment ! ce que je vais faire ! ne le devinez-vous pas ? Celles que nous voulons sauver sont à quelques lieues à peine de nous, et vous m’adressez cette question !

— Je vous l’adresse parce que je crains que, par votre fougue et votre imprudence, vous ne compromettiez le succès de notre expédition.

— Vos paroles sont dures, vieux chasseur ; mais je vous les pardonne, car vous ne pouvez comprendre ce que j’éprouve.

— Peut-être oui, peut-être non, don Miguel ; mais, croyez-moi, dans une expédition comme la nôtre, la ruse seule peut nous faire réussir.

— Au diable la ruse et celui qui la conseille ! s’écria le jeune homme avec violence. Je veux délivrer les jeunes filles que moi-même, par ma folle confiance, j’ai fait tomber dans ce traquenard.

— Et que vous perdrez pour jamais par une autre folie, croyez-en l’expérience d’un homme qui a vécu au désert plus d’années que vous ne comptez de mois dans votre vie. Depuis que nous suivons la piste de don Estevan, nous