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Page:Aimard - L’Éclaireur, 1860.djvu/360

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L’ÉCLAIREUR.

— Vous avez, en cette qualité, je le crois, le droit de siéger au conseil.

— En effet.

— Pourquoi n’y siégeriez-vous pas ?

L’Aigle-Volant jeta un regard interrogateur an Canadien qui écoutait cette conversation le visage impassible, bien que son cœur battît à rompre sa poitrine ; car il devinait, par une espèce de pressentiment, que dans ce conseil on discuterait des questions de la plus haute importance pour lui. À la muette interrogation du chef, il comprit que rester plus longtemps hors de la discussion serait affecter aux yeux de son hôte, pour les intérêts de la ville, une indifférence que celui-ci pourrait prendre en mauvaise part.

— Si j’étais un aussi grand chef que l’Aigle-Volant, dit-il, je n’hésiterais pas à me présenter au conseil ; ici ce ne sont pas les intérêts de telle ou telle nation qui se discutent, ce sont souvent des questions vitales qui sont soulevées dans l’intérêt de la race rouge en général : s’abstenir dans de telles circonstances, serait, à mon avis, donner aux ennemis de l’ordre et de la tranquillité de la ville une preuve de faiblesse, dont, sans doute, ils sauraient profiter pour faire réussir leurs projets anarchiques.

— Le croyez-vous ? répondit l’Aigle-Volant en feignant d’hésiter.

— Mon frère Deux-Lapins a bien parlé, reprit avec feu Atoyac, c’est un homme sage. Mon frère doit suivre son conseil, et cela avec d’autant plus de raison que sa présence ici est connue de tout le monde, et que son absence du conseil produirait certainement un très-mauvais effet.

— Puisqu’il en est ainsi, répondit le Comanche, je ne résiste plus à votre désir, je suis prêt à vous suivre.

— Oui, ajouta avec intention le chasseur, allez au conseil ; peut-être votre présence imprévue suffira-t-elle pour