Aller au contenu

Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/153

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
146
LA FIÈVRE D’OR.

proverbiale, — mais parce qu’à ce moment don Sébastian, étant débarrassé de toute autre préoccupation, devait conséquemment subir plus facilement l’influence qu’il pensait parvenir à exercer sur lui.

Le capitaine se servit du refino dans un grand verre qu’il emplit d’eau, alluma un puro, appuya les coudes sur la table et, fixant un regard interrogateur sur le jeune homme.

— Muchacho, lui dit-il nettement, est-ce que la vie que tu mènes dans ce désert a pour toi beaucoup de charmes ?

Surpris de cette question, à laquelle il était loin de s’attendre, don Sebastian demeura un instant sans répondre.

— Oui, reprit le capitaine en vidant son verre, t’amuses-tu beaucoup ici ? Réponds-moi franchement.

— Ma foi, capitaine, comme je n’ai jamais connu d’autre existence que celle que je mène en ce moment, je ne saurais répondre complétement à votre question ; il est certain que, parfois, je me trouve un peu désœuvré.

Le capitaine fit claquer sa langue contre son palais avec une satisfaction évidente.

— Ah ! Ah ! fit-il, je suis heureux de t’entendre parler ainsi.

— Pourquoi donc ?

— Parce que j’espère que tu accepteras facilement la proposition que j’ai à te faire.

— Vous ?

— Et qui donc, si ce n’est moi ?

— Parlez, répondit le jeune homme d’un air nonchalant, je vous écoute.