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Page:Aimard - La Fièvre d’or, 1860.djvu/260

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LA FIÈVRE D’OR.

temps précieux. Seulement, vous admettrez avec moi, n’est-ce pas, que tout homme chargé d’une mission doit l’accomplir en entier, vous êtes trop intelligent et trop rompu aux affaires pour ne pas en convenir.

— J’en conviens, monsieur, répondit don Antonio subitement calmé par ces paroles.

— Très-bien, veuillez alors vous rasseoir et me prêter votre attention encore quelques minutes.

— Soyez bref, monsieur.

— Je ne vous demande que cinq minutes.

— Soit, je vous les accorde.

— Vous êtes généreux, monsieur ; je vais donc profiter de votre gracieuseté. Je reprends donc. Vous êtes inscrit pour deux cent actions, qui font, si je ne me trompe, cent mille piastres, ce qui, à mon avis, est un assez beau denier.

— Monsieur, plus un mot sur ce sujet !

— Je sais, continua imperturbablement le colonel, ce que vous allez m’objecter : Mas vole pajaro en mano que buitre volando[1].

Don Antonio, étourdi de la signification donnée à ses paroles, ne trouva rien à répondre.

Le colonel reprit :

— Les chefs de la société ont fait le même raisonnement que vous, monsieur ; ils ont compris qu’avec un homme aussi honorablement posé que vous et si digne sous tous les rapports de leur confiance, il fallait agir cartes sur table et loyalement ; en conséquence, ils m’ont chargé de vous remettre, outre les actions…

  1. « Mieux vaut un oiseau dans la main qu’un vautour qui vole. » — Proverbe espagnol.