Page:Aimard - La Loi de Lynch, 1859.djvu/89

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Plusieurs chefs étaient silencieusement accroupis autour d’un feu qui brûlait devant un calli que le Chat-Noir reconnut pour être le calli de médecine.

Contrairement à l’usage adopté en pareil cas, nul ne parut remarquer l’approche du chef ; personne ne se leva pour lui faire honneur et lui souhaiter la bienvenue.

Le Chat-Noir comprit qu’il se passait quelque chose d’extraordinaire dans le village, et qu’il allait assister à une scène étrange.

Il ne s’émut nullement de la froide réception qui lui était faite, mit pied à terre, jeta la bride sur le cou de son cheval, et, marchant vers le feu, il s’accroupit en face de l’Unicorne, entre deux chefs qui se reculèrent à droite et à gauche pour lui faire place.

Sortant alors son calumet de sa ceinture, il le bourra, l’alluma, et se mit à fumer après avoir salué les assistants d’un signe de tête.

Ceux-ci lui répondirent par le même geste, mais sans rompre le silence.

Enfin l’Unicorne ôta le calumet de sa bouche, et se tournant vers le Chat-Noir :

— Mon frère est un grand guerrier, dit-il, qu’il soit le bienvenu ; son arrivée est d’un heureux augure pour mes jeunes hommes au moment où un chef redoutable va nous quitter pour se rendre dans les prairies bienheureuses.

— Le maître de la vie m’a protégé en me faisant arriver si à propos, répondit l’Apache ; mais quel est le chef qui va mourir ?

— La Panthère est las de la vie, reprit l’Unicorne d’une voix triste ; il compte beaucoup d’hivers ; son bras fatigué ne peut plus frapper le bison ni l’é-