Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/20

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Bien que sa position entre ces féroces ennemis fût assez précaire et qu’il ne se dissimulât nullement le danger qu’il courait seul contre eux, il n’en résolut pas moins de leur faire bravement tête.

Sans perdre de vue le jaguar que le premier il avait aperçu, il obliqua légèrement en faisant quelques pas en arrière, de façon à avoir ses ennemis presque en face, au lieu de se trouver entre eux.

Cette manœuvre, qui exigea un temps assez long, réussit au delà de ses espérances.

Les jaguars le regardaient en se pourléchant et en se passant la patte derrière l’oreille avec ces mouvements pleins de grâce particuliers à la race féline.

Les deux fauves, certains de leur proie, semblaient jouer avec elle et ne se hâtaient pas de la saisir.

Tout en ayant l’œil au guet, le Mexicain ne s’endormait pas dans une trompeuse sécurité ; il savait que la lutte qu’il allait entreprendre était une lutte suprême et il prenait ses précautions.

Les jaguars n’attaquent l’homme que contraints par la nécessité ; ceux-ci cherchaient surtout à saisir le cheval.

La noble bête, solidement attachée par son maître, s’épuisait en vains efforts pour rompre les liens qui la retenaient et s’échapper.

Elle tremblait de terreur aux acres émanations des fauves.

L’inconnu, dès que ses précautions furent prises complétement, épaula son rifle une seconde fois.

En ce moment, les jaguars levèrent la tête en couchant les oreilles et humant l’air avec inquiétude.

Un bruit presque imperceptible s’était fait entendre dans les broussailles.