Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/263

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serais-je trompé ? et mon frère n’aime-t-il réellement que les bisons dont il mange la chair et dont il vend la peau dans les tolderias ?

— Que mon frère s’explique plus clairement, alors je tâcherai de lui répondre.

Il y eut un instant de silence. L’Indien semblait réfléchir profondément : ses narines se gonflaient, et parfois son œil noir lançait des éclairs.

Les chasseurs attendaient impassibles la suite de cet entretien dont ils ne saisissaient pas encore le but.

Enfin l’Unicorne releva la tête, rendit à son regard toute sa sérénité, et d’une voix basse et mélodieuse :

— Pourquoi feindre de ne pas me comprendre, Koutonepi (Vaillant) ? dit-il : un guerrier ne doit pas avoir la langue fourchue ; ce qu’un homme seul ne peut faire, deux peuvent le tenter et réussir ; que mon frère parle, les oreilles d’un ami sont ouvertes.

— Mon frère a raison, je ne tromperai pas son attente : la chasse que je veux faire est sérieuse ; c’est une femme de ma couleur que je tente de sauver ; mais que peut la volonté d’un homme seul ?

— Koutonepi n’est pas seul ; je vois à son côté les deux meilleurs rifles des frontières. Que me dit donc le chasseur blanc ? Ne serait-il plus le grand guerrier que je connais ? Douterait-il de l’amitié de son frère Haboutzelze, le grand sachem des Comanches ?

— Je n’ai jamais douté de l’amitié de mon frère ; je suis un fils adoptif de sa nation ; en ce moment même ne cherche-t-il pas à me rendre service ?

— Ce service n’est que la moitié de ce que je veux faire ; que mon frère dise un mot, et deux cents guerriers comanches se joindront à lui pour délivrer la vierge des Faces Pâles et prendre la chevelure de ses ravisseurs.