Page:Aimard - Le Chercheur de pistes, 1860.djvu/342

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moine se tut, il le regarda un instant avec une expression étrange, s’approcha de lui presque à le toucher, tira une paire de pistolets de sa ceinture, et les dirigeant sur le moine :

— Rendez-moi doña Clara, dit-il d’une voix basse et menaçante.

Fray Ambrosio avait suivi d’un œil attentif tous les mouvements de l’Américain, et lorsque celui-ci lui avait appuyé la gueule de ses pistolets sur la poitrine, d’un geste rapide comme l’éclair, le moine avait sorti aussi deux pistolets de sa ceinture et les avait appuyés sur la poitrine de son adversaire.

Il y eut un instant d’attente suprême, d’angoisse indescriptible ; les deux hommes étaient immobiles, visage contre visage, la respiration haletante, le regard brillant, le doigt sur la détente, pâles et le front mouillé d’une sueur froide.

Andrès Garote, les lèvres plissées par un sourire sardonique, les bras croisés, nonchalamment appuyé contre une table, considérait cette scène qui paraissait avoir pour lui l’attrait d’un spectacle.

Tout à coup la porte du rancho, qu’après l’arrivée du squatter on avait oublié de fermer, s’ouvrit avec fracas et un homme parut.

Cet homme était le père Séraphin.

D’un coup d’œil il jugea la position et se jeta résolument entre les deux ennemis en les écartant brusquement du geste, mais sans prononcer une parole.

Les deux hommes reculèrent en baissant leurs armes, mais en continuant à se menacer du regard.

— Eh quoi ! dit le missionnaire d’une voix profonde, suis-je donc arrivé à temps pour empêcher un double meurtre, messieurs ? Au nom de Dieu, cachez