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Le Forestier

En entendant cet exposé si clair et si lucide du plan que l’amiral avait conçu, les officiers ne purent retenir l’expression, non de leur surprise, mais de leur admiration en effet, tout était prévu et déduit avec une habileté singulière ; il n’y avait rien, non pas à changer, mais seulement à modifier ; comme toujours en pareille circonstance, Montbarts avait tranché la difficulté d’un seul coup ; M. d’Ogeron lui-même, le sceptique par excellence, fut convaincu devant de telles dispositions ; il crut au succès de l’expédition et le dit hautement, tout en félicitant Montbarts de la sûreté et de l’excellence des dispositions si simples, cependant, qu’il avait imaginées.

Amiral, dit Morgan au nom de tous avec un charmant sourire, c’est pure courtoisie de votre part de nous convoquer en conseil vous n’avez nullement besoin de nous il ne nous reste qu’à obéir aux ordres qu’il vous plaira de nous donner.

— Ainsi, messieurs, ce plan vous semble non seulement possible, mais encore exécutable.

— Il serait impossible, amiral, d’on faire un meilleur, et nous nous v rallions tous de grand cœur et sans arrière-pensée.

— Je vous remercie, messieurs, nous t’exécuterons donc avec votre aide j’ai bon espoir dans la réussite.

— Avec un chef tel que vous, amiral, reprit Morgan, la réussite des plans même les plus audacieux est toujours certaine nous tacherons de nous montrer dignes de vous ; en toutes circonstances l’obéissance est un devoir, ici c’est un plaisir et un honneur.

Tous les officiers pressèrent la main de Montbarts et l’assurèrent, avec effusion, de leur dévouement absolu.

— Quand partez-vous, amiral ? demanda M. d’Ogeron.

— Aujourd’hui même, monsieur, avec votre permission, et se tournant vers ses officiers, il ajouta

— Nous sommes le 20 mars, messieurs, dit-il, le rendez-vous général est fixé au 10 avril, au Rio San Juan.

— Nous y serons répondirent-ils d’une seule voix.

Deux heures plus tard, la flotte flibustière appareillait par escadres, et s’éloignait en haute mer aux acclamations frénétiques de la foule pressée sur le rivage.

Jamais danger plus terrible n’avait menacé les possessions espagnoles de terre ferme.

La flotte manœuvrait avec un ensemble et une adresse admirables dans ce port si resserré : on n’eut pas à signaler le plus léger accident. Bientôt les