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LES FRANCS TIREURS.

que souffle d’air passer de fauves reflets sur les énergiques physionomies des conjurés, avait un aspect lugubre et saisissant à la fois.

Après un instant de silence, le chef reprit d’une voix ferme et accentuée :

— Qu’importe, compagnons, qu’un espion se soit lâchement glissé dans nos rangs ; l’heure des craintes et des hésitations est passée, maintenant c’est à la face de tous que nous marcherons ; plus de réunions secrètes, plus de masques, ajouta-t-il en arrachant violemment le sien et le foulant aux pieds ; il faut que nos ennemis nous connaissent enfin et sachent que nous sommes réellement les apôtres de la liberté qui va luire comme un phare éclatant sur notre patrie.

— Le Jaguar ! s’écrièrent les conjurés en se précipitant joyeusement vers lui.

— Oui, le Jaguar, reprit-il d’une voix tonnante, le chef des francs-tireurs, l’homme qui le premier au Texas a osé se lever contre nos oppresseurs ; le Jaguar, qui a juré de vous faire libres et qui tiendra son serment, à moins que la mort ne l’arrête ; maintenant, que le lâche qui nous a vendus complète son œuvre, en révélant mon nom au gouverneur qui déjà l’a deviné presque et sera heureux d’acquérir enfin une certitude. Cette dernière dénonciation sera chèrement payée sans doute ! mais qu’il se hâte, demain il serait trop tard.

En ce moment un homme se fit jour au milieu des conjurés en écartant à droite et à gauche ceux qui lui barraient le passage, et vint se placer en face du jeune chef.

— Ecoutez, dit-il en se tournant vers ses compa-