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LES FRANCS TIREURS.

Lutte horrible, carnage affreux, à coups de piques, de haches, de sabres, lutte où chaque blessure est mortelle et qui rappelle ces hideux combats à outrance des plus mauvais jours du moyen-âge, alors que la force brutale seule faisait loi.

Jamais le Scalpeur-Blanc n’avait combattu avec autant d’acharnement. Furieux d’avoir laissé échapper la proie dont il s’était si audacieusement emparé, à demi fou de colère, il semblait se multiplier, s’élançant sans relâche, avec des rauquements de bête fauve au plus épais de la mêlée, cherchant Carméla et brûlant de tuer celui qui la lui avait si intrepidement ravie.

Le hasard sembla vouloir un instant lui sourire en le plaçant tout à coup en face du capitaine.

— À nous deux ! s’écria-t-il en poussant un cri de joie.

Le capitaine leva sa hache.

— Non ! non ! fit Tranquille en se jetant vivement devant lui, cette victime m’est réservé ! C’est moi, moi seul qui tuerai ce tigre à face humaine. D’ailleurs, ajouta-t-il avec un sourd ricanement, c’est mon métier de tuer les bêtes fauves : celle-là ne saurait m’échapper.

— Ah ! fit le Scalpeur-Blanc, c’est bien réellement la fatalité qui te remet devant moi ! Eh bien, soit ! À toi d’abord !

— C’est toi qui va mourir, misérable ! reprit le Canadien. Ah ! tu m’avais enlevé ma fille, tu te croyais bien caché, n’est-ce pas ? Mais je m’étais mis sur ta piste, voilà trois mois que je te suis pas à pas et que je guette l’heure favorable de la vengeance.