Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/165

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choses du monde ; il l’a menacée, que sais-je ? et il l’a ainsi effrayée et rendue presque folle…

— Et vous voulez, mon père, que moi…

— Je veux que tu te calmes et que tu m’écoutes, reprit le docteur avec une énergie croissante. Je ne suis pas un enfant, moi ; on ne m’effraye pas facilement. Je vais monter à cheval, me rendre à Louberria, me faire rendre compte de ce qui s’est passé, et couper net les griffes de Felitz Oyandi, d’abord en remettant aux Mendiri le double de la somme qu’ils lui doivent, et qui ne saurait être bien considérable, car le père Oyandi tient très serrés les cordons de sa bourse ; puis, ce soir, après ton départ, je conduirai Denisà à Bayonne, dans une maison où je mets au défi tous les Oyandi, présents, passés et futurs, de la découvrir. Crois-moi, cela vaudra mieux que toutes les violences auxquelles tu pourrais te livrer et qui ne produiraient d’autre résultat que celui de te faire arrêter plus vite, et cela nous donne l’avantage sur ton ennemi, qui, après toutes ses menaces, restera capot.

— Bravo ! s’écria Bernardo, Oyandi sera battu encore une fois !

— Et j’espère que ce ne sera pas la dernière ! Qu’en dis-tu, fils ?

— Mon père, cette fois encore, je m’incline devant vous. Pardonnez-moi, vous avez toutes les délicatesses du cœur ; si je ne vous avais pas, je ne ferais que des sottises.

— Il y a du vrai dans ce que tu dis là, fit le docteur en souriant. Passe dans la salle à manger avec Bernardo ; mettez-vous à table, je vous rejoindrai bientôt. J’entends Picahandia qui m’appelle, je vais voir un peu dans quel état se trouve notre malade.

Les deux jeunes gens obéirent.

Leur appétit n’était pas très grand ; ce qui s’était passé sous leurs yeux leur avait causé de telles émotions, que la faim leur était passée.

Ils attendirent donc le retour du docteur avant de commencer leur repas.