Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/242

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C’était une admirable enfant, petite, mignonne, en un mot, toute pétrie de grâces.

Le jeune homme avait dix-huit ans, il était de haute taille ; c’était un homme pour la vigueur et la résolution.

Il était vif, alerte, et ressemblait beaucoup à son père, dont il avait les traits caractérisés et la physionomie intelligente et fière.

Ces quatre personnes ne portaient nullement les vêtements des Peaux-Rouges du désert, mais bien le costume riche et pittoresque des rancheros mexicains.

Leurs yeux, dont l’extrémité était légèrement relevée vers les tempes, sans que cette courbe fût aussi prolongée que chez les Mongols et les Malais, ce signe caractéristique et particulier à la race indienne pure, établissaient seuls une différence entre eux et les Espagnols d’Europe.

À l’entrée de ces prisonniers, les deux chasseurs s’étaient levés d’un air indifférent, et s’étaient rapprochés du Mayor, occupé à causer avec le Canadien.

Les chasseurs se mêlèrent aux bandits et attendirent.

Il y eut un silence complet de deux ou trois minutes.

Enfin le Mayor, se tournant vers les prisonniers, leur dit d’une voix railleuse, en langue comanche :

— Êtes-vous enfin décidés à me répondre ?

— Oui, répondit le père en espagnol, si vous m’adressez la parole en castillan, que vous partez aussi purement que moi, et que tout le monde comprend ici.

— Vous êtes Indien, je vous parle dans votre langue, reprit le Mayor avec mépris.

— Non pas, ma langue est l’espagnol ; je suis Indien, il est vrai, je descends de race royale, mes ancêtres ont régné à Mexico, je suis Inca ! Après la conquête du Mexique par Fernan Cortès, ma famille a embrassé le christianisme, a reconnu le gouvernement espagnol et adopté les coutumes de ses conquérants ; je suis, moi, alcade mayor du presidio de Tubac. Vous savez toutes ces choses aussi bien que moi, pourquoi donc feignez-vous de les ignorer ? Prenez garde, je ne suis peut-être pas aussi abandonné que vous le croyez ?