Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/319

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Le chef, homme de haute taille, aux larges épaules, à la forte musculature, les jambes un peu arquées par l’habitude du cheval, vêtu d’un riche costume de ranchero mexicain, et dont les traits disparaissaient sous les ailes du chapeau, avait quatre longs revolvers et un poignard à garde d’or ciselé, passés dans la faja en crêpe de Chine qui lui serrait les hanches.

Un long sabre droit à fourreau de fer était accroché à son côté gauche.

Une carabine était appuyée contre un arbre auprès de lui.

Il portait de longues bottes molles jaunes montant au-dessus du genou, et garnies de lourds éperons d’argent.

Il se promenait de long en large, derrière le feu, le cigare à la bouche.

Parfois il s’arrêtait, semblait interroger le ciel, puis il paraissait prêter l’oreille aux bruits du désert.

Il frappait du pied avec impatience, et reprenait sa promenade, qu’il interrompait quelques moments après, et toujours ainsi.

— Il attend quelque chose, murmurait le Canadien, mais qu’attend-il ?

Soudain une lueur traversa son esprit.

Il se frappa le front : s’il eût su le grec, sans doute comme Archimède il se fut écrié : Euréka !

Mais comme il ignorait jusqu’à l’existence de cette intéressante nation, le chasseur se borna à exprimer sa pensée en franco-normand du Canada.

— Par ma foi de Dieu ! j’y suis ! s’écria-t-il ; ces deux démons se sont lancés à la poursuite des vagabonds indiens qui ont si prestement pris la fuite tout à l’heure. Les vautours se réunissent en troupe pour fondre sur une proie qu’ils supposent de difficile digestion. Nous allons les voir revenir de compagnie, cela ne fait pas de doute pour moi.

Il inspecta l’horizon, mais rien n’apparaissait.

Il se frotta joyeusement les mains, très satisfait d’avoir si bien deviné.