Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/350

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après une hésitation de deux ou trois minutes, traversa rapidement la tente… il ne s’arrêta qu’une seconde à peine pour se tourner et regarder avec une expression d’angoisse indicible l’enfant qui l’appelait en pleurant et joignant les mains en lui criant : « Père ! père ! c’est moi ! » Je ne sais ce qui serait arrivé si des civicos n’étaient subitement apparus sur le seuil de la tente. Alors le visage de cet homme se décomposa subitement, prit une expression de poignant désespoir, et il s’élança en criant d’une voix rauque et inarticulée : « Tu te trompes, enfant, ton père est mort ! » et il disparut aussitôt en éventrant d’un coup de sabre la toile de la tente.

— Voilà qui est singulier ! murmura Cœur-Sombre.

— Cet homme serait-il donc le père de cette enfant ? ajouta Main-de-Fer.

— Oh ! ce serait trop affreux ! s’écria la comtesse avec horreur.

— Tout est possible, malheureusement, madame, dit le chasseur.

— Hélas ! c’est vrai, murmura-t-elle.

— Pardon, madame, reprit Cœur-Sombre ; vous nous aviez promis l’histoire de votre gentille protégée.

— C’est juste ; écoutez-moi donc, messieurs.

La comtesse raconta avec les plus minutieux détails la découverte de l’enfant, et comment elle l’avait adoptée.

Puis, elle rapporta les différents interrogatoires qu’elle lui avait fait subir, et ce qu’elle était parvenue à apprendre ainsi sur le passé de l’enfant et la catastrophe qui l’avait brutalement jetée dans le désert.

Les deux chasseurs avaient écouté ce double récit avec la plus sérieuse attention et sans interrompre une seule fois la charmante narratrice.

— Eh bien ! dit-elle en terminant, que pensez-vous de cette histoire, messieurs ? Croyez-vous pouvoir y ajouter quelque chose susceptible d’éclaircir un peu ce mystère ?

— J’en doute, madame. Nous ne pouvons procéder que par induction ; cependant, peut-être apporterons-nous