Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/410

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Au moment où la comtesse arriva au bas du perron, un homme portant l’uniforme de chirurgien en chef de l’armée française, la poitrine constellée de décorations, droit et vigoureux encore, bien qu’il eût dépassé la cinquantaine de cinq ou six ans au moins, écarta de la main les personnes derrière lesquelles, jusqu’à ce moment, il s’était dissimulé.

Il descendit rapidement les quelques marches du perron, s’approcha du cheval de la comtesse, et s’inclinant respectueusement devant elle en lui tendant la main, il lui dit, du ton le plus affectueux :

— Je ne veux laisser à personne le soin de vous aider à mettre pied à terre, madame, c’est un bonheur que je revendique.

— Et auquel vous avez toute espèce de droit, mon bon docteur, répondit la comtesse, en souriant et lui tendant la main.

Et, à peine soutenue par le docteur, elle sauta à terre, vive et légère comme un oiseau.

— Oh ! que je suis heureuse de vous revoir après tant d’années, mon bon docteur, dit-elle avec effusion, en appuyant le bras sur celui que lui présentait son cavalier mais un mot avant tout, de grâce, un mot… cher docteur ?

— Parlez, madame la comtesse, ne vous suis-je pas tout acquis ?

— Quelle est cette délicieuse jeune femme qui est là, tenez, sur la première marche du perron et qui nous regarde, voyez, avec ces grands yeux bleus et doux ? Depuis que je l’ai aperçue, tout mon être a tressailli, et mon cœur s’est élancé vers elle.

— Vous ne l’avez pas reconnue ? demanda le docteur en souriant.

— Non, puisque je ne l’ai jamais vue ; mais mon cœur l’a devinée, j’en suis sûre, à ses battements précipités.

— Eh bien ! dites vous-même ce nom que vous me demandez, charmante sibylle ?

— Non, pas à vous, méchant homme, qui vous plaisez