Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/67

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reculée, elle a, pendant un certain temps, servi de citadelle à la ville.

— Eh bien, c’est précisément cela, mon bon docteur, reprit-elle en souriant ; les murs massifs de cette construction féodale renferment une foule d’escaliers secrets et de cachettes ignorés de notre génération actuelle, et dont seule avec mon mari je connais l’existence ; un de ces escaliers en spirale débouche dans ma chambre à coucher, par une porte si bien dissimulée, qu’à moins d’être certain de son existence, il est impossible de la découvrir ; après avoir monté jusqu’au sommet de la maison, cet escalier descend dans un souterrain aboutissant à une espèce d’excavation naturelle qui doit se trouver près d’ici.

— En effet, madame, elle est là en face de nous ; mais je l’ai visitée souvent, et jamais je n’ai remarqué…

— Oh ! l’issue est soigneusement masquée, reprit la jeune femme, avec un sourire mélancolique ; c’est par cette excavation, et sans être aperçu de personne, que ce soir mon mari s’est introduit dans ma chambre à coucher. Voilà comment il a pu s’emparer de moi et m’enlever sans que mes domestiques s’en soient aperçus ; me comprenez-vous à présent, mon bon docteur ?

— Oh, parfaitement, madame !

— Il est donc indispensable que je rentre par cette issue secrète. Si nous allions jusqu’à Saint-Jean-de-Luz, mes gens ne comprendraient pas comment je suis sortie, surtout dans le costume de chambre que je porte ; de là une foule de commentaires et un scandale affreux qu’il importe surtout d’éviter.

— Vous avez mille fois raison, madame. Mais aurez-vous la force de marcher ?

— Rassurez-vous à ce sujet, docteur ; grâce à vos bons soins, et aux cordiaux réconfortants que vous m’avez fait boire, je suis complètement remise ; d’ailleurs, en serait-il autrement, je ne pourrais vous répondre que ceci : il le faut !

— C’est juste, vous avez raison, madame.

Le docteur mit pied à terre, prit le cheval par la bride,