Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/66

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

un peu plus de la Nivelle, je vous prie, mon bon docteur, ajouta-t-elle, après un instant.

— Voulez-vous que nous suivions la rive ? Il nous faudra descendre pour cela, il n’y a pas de route frayée.

— C’est vrai, je n’y songeais pas.

— Et puis cela allongerait le chemin, la Nivelle fait des méandres que nous évitons sur la route.

— Nous n’allons pas jusqu’à Saint-Jean-de-Luz.

— Comment, nous n’allons pas jusqu’à Saint-Jean-de-Luz.

— Non, vous allez voir.

Le docteur baissa la tête sans répondre ; cinq minutes s’écoulèrent ainsi.

La marquise regardait toujours, avec une attention extrême.

Tout à coup elle posa sa main mignonne et adorable de formes, sur le bras du docteur.

— Arrêtez, lui dit-elle.

— M’arrêter ? répondit-il avec surprise.

— Oui, docteur, nous sommes arrivés.

— Arrivés ? Regardez bien autour de vous ; madame ; nous sommes en pleine campagne.

— C’est vrai, mon bon docteur ; cependant, nous sommes arrivés. Il est inutile d’aller plus loin. Si nous poussions jusqu’à la ville, il me serait impossible de rentrer chez moi sans être vue.

— Oh ! ne craignez rien, madame ; à cette heure, tout le monde dort à Saint-Jean-de-Luz. Nous ne rencontrerons personne dans les rues.

— Je le sais, docteur ; mais, je vous le répète, nous sommes arrivés. Laissez-moi vous apprendre une chose que vous ignorez, ainsi que tous les habitants de Saint-Jean-de-Luz : l’hôtel de Garmandia est une des dernières demeures féodales qui existent encore à Saint-Jean-de-Luz ; cette vieille et vénérable demeure date, si mes souvenirs ne me trompent pas, des dernières années du treizième siècle.

— Je le sais, madame ; je sais même qu’à une époque