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Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris.djvu/72

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— Maîtresse, si vous me dites cela pour m’éprouver, ce n’est pas bien ; vous savez que je vous aime, que je n’ai plus que vous, puisque mon père et ma mère sont morts. Je suis à vous, en tout et pour tout. Si vous me parlez ainsi, c’est que vous doutez de moi et que vous ne m’aimez pas ; que vous ai-je donc fait, mon Dieu ! Si, sans le savoir, j’ai commis quelque faute, pardonnez-moi, madame, je vous en prie mais ne me dites jamais que je puis vous quitter, car vous me briseriez le cœur.

Et la pauvre enfant fondit en larmes et éclata en sanglots ; la marquise l’attira dans ses bras, sécha ses larmes avec son mouchoir, et lui mit un baiser au front.

— Ne pleure plus, folle enfant, lui dit-elle doucement ; je sais ce que je voulais savoir ; je t’aime comme tu m’aimes, n’es-tu pas ma sœur ? Jamais je ne me séparerai de toi.

— Bien vrai ? s’écria-t-elle riant et pleurant à la fois.

— Je te le jure, mignonne, tu ne me quitteras que lorsque toi-même me le demanderas.

— Oh ! alors, s’écria-t-elle en frappant ses mains l’une contre l’autre, me voilà tranquille ; mais est-ce bien vrai, que vous allez voyager, maîtresse ?

— Peut-être, enfant ; cela te chagrinerait-il ?

— Moi ? Partout où vous irez, je serai bien ; à la condition de rester avec vous.

— Eh bien, il est possible que d’ici à quelques jours nous quittions Saint-Jean-de-Luz.

— Pour ma part, je n’en serai pas fâchée ; la ville est sombre, les habitants parlent une langue que personne ne comprend.

— Voyez-vous, mademoiselle la Parisienne ! dit la marquise en souriant ; elle regrette les bois de Chaville et de Meudon !

— Et le bois de Boulogne aussi, maîtresse ; au moins, là-bas, les gens ont figure humaine, au lieu qu’ici, ils ressemblent aux ours de leurs montagnes ; est-ce que nous irons à Paris, maîtresse ?

— Je ne dis pas non, fillette ; mais, n’oublie pas que