Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/113

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Les sentinelles avaient crié : Qui vive !

On avait répondu du dehors ; plusieurs cavaliers avaient pénétré dans le camp.

Le Mayor se redressa.

Il épongea son front couvert de sueur, rendit presque subitement le calme à ses traits bouleversés par la colère et l’inquiétude, et un sourire d’une expression singulière entr’ouvrit ses lèvres.

— Enfin ! murmura-t-il avec un soupir de soulagement.

Et comme un pas pressé se faisait entendre au dehors, il alla s’asseoir près d’une table encombrée de papiers, et appuyant la tête dans sa main gauche et le coude sur le table, il sembla s’absorber dans la lecture d’un papier qu’il avait pris au hasard.

Le Mayor était un comédien achevé et un poseur émérite.

Il posait sans cesse devant ses gens, même devant ses plus intimes.

Ces habitudes étaient tellement invétérées chez lui que souvent, sans s’en douter, il jouait la comédie et posait devant lui-même, quand il était seul et que personne ne pouvait le voir.

Quelques instants s’écoulèrent ; la couverture servant de portière au jacal fut soulevée du dehors, et un homme entra.

— Ah ! c’est vous, Navaja, dit le Mayor avec une feinte indifférence. Vous avez bien tardé, je n’espérais plus vous revoir.

— Il s’en est fallu de peu que je ne revinsse pas, Mayor.

— Oh ! oh ! mais vous êtes sain et sauf, il me semble ?

— Oui, grâce à Dieu ! mais la campagne a été rude.

— Enfin, avez-vous des nouvelles ?

— Oui, Mayor.

— Bonnes ou mauvaises ?

— Des unes et des autres.

— Ah !… Vous semblez fatigué ?

— J’ai crevé deux chevaux pour arriver plus vite ; j’ai