Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/164

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— Je ne dis pas non, mais je le connais certainement aussi bien que vous ; j’ai assisté à toute l’affaire.

— Comment cela ? Je ne vous ai pas vu ?

— J’étais là cependant, et, à ce sujet, compagnon, j’ai un aveu à vous faire.

— Un aveu à moi ? Je ne vous comprends pas.

— Cela ne m’étonne pas, mais bientôt vous comprendrez. Voici la chose en deux mots. J’étais caché ou plutôt embusqué au sommet d’un arbre, et j’ai assisté invisible à tout ce qui s’est passé ; j’ajouterai que le coup de feu que vous avez reçu a été tiré par moi.

— C’est vous qui avez tiré ?

— Parfaitement.

— Et d’après l’ordre du Mayor, sans doute ?

— Peut-être ! répondit Navaja avec un sourire équivoque, qui sous-entendait bien des choses.

— J’en étais sûr, dit Sebastian avec ressentiment ; mais tout n’est pas fini entre le Mayor et moi, ajouta-t-il d’un ton de menace, nous nous reverrons ! Quant à vous, compagnon, je ne vous garderai pas rancune de ce que vous avez fait, et je vous pardonne franchement d’avoir essayé de me tuer pour servir la vengeance d’un autre.

— Vous vous trompez, mon camarade, dit Navaja, je n’ai pas le moins du monde essayé de vous tuer ; j’ai au contraire voulu vous donner une chance d’évasion ; il est vrai cependant que j’ai annoncé votre mort au Mayor, et qu’il a reçu cette nouvelle avec joie, je dois en convenir.

— Oui, je comprends ; il se félicitait d’être débarrassé de moi ; mais, patience !

— Voyons maintenant la suite de vos aventures ?

— À votre coup de feu, tous les chasseurs s’étaient lancés a votre poursuite. Moi, bien que la balle n’eût traversé que les chairs de mon bras gauche, je tombai comme si vous m’aviez tué… Mais, me trouvant seul dans la clairière, abandonné accidentellement par les chasseurs, je me relevai vivement, et m’emparant d’un couteau qui se trouvait par hasard près de moi, je m’élançai dans les fourrés et je me mis à courir avec la rapidité