Page:Aimard - Les Peaux-Rouges de Paris II.djvu/205

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clinant, bien que cette démarche puisse vous paraître un peu prématurée.

— Nullement, cher monsieur. Je la trouve parfaitement correcte au contraire. Nous avons fait un marché, les clauses de ce marché stipulent certaines choses qui ont été exécutées loyalement par vous ; je me suis engagé à régler avec vous aussitôt après la tentative de surprise tentée par le Mayor ; tout cela est positif et ne donne lieu à aucune équivoque ; votre démarche de ce matin est donc parfaitement légale a mes yeux.

— Vous avez raison, monsieur, au point de vue des affaires, mais à celui des convenances, c’est autre chose. J’aurais dû laisser passer quelques heures de plus avant de venir vous importuner de mes réclamations ; mais, pour ma justification et afin de vous prouver que je ne suis pas un malotru, je dois vous avouer une incroyable faiblesse de mon organisation.

— Je ne vois pas, monsieur…

— Permettez-moi, je vous prie, de vous faire connaître cette faiblesse, insista-t-il en souriant.

— Puisque vous le désirez si vivement, parlez, monsieur, je suis prêt à vous entendre.

— Mon Dieu, monsieur, ce que je vais vous dire va sans doute vous paraître bien ridicule, tranchons le mot, de la part d’un homme comme moi : je crois aux pressentiments.

— Vous croyez aux pressentiments ? fit Julian avec surprise et regardant l’aventurier avec un léger froncement de sourcils.

— Oui, monsieur. Oh ! ne supposez pas que j’aie l’intention de me railler de vous. Je crois aux pressentiments, et j’y crois fermement, parce que j’ai des raisons péremptoires pour qu’il en soit ainsi.

— Ce qui signifie ?

— Que depuis près de quarante ans que je suis au monde, chaque fois qu’il m’est arrivé quelque chose d’heureux ou de malheureux, il m’a été annoncé par un